Portrait de Joao qui se confie sur l'entretien de ses locs

Joao nous explique que les hommes noirs ont finalement peu de choix quand on parle de coiffures

Joao vit au Brésil. Dans ce portrait, il nous raconte comment selon lui, les hommes noirs ont peu de choix quand on parle de coiffures, comment il a cherché et trouvé son style en faisant des locs et comment le Brésil est en train lui aussi, de vivre sa révolution capillaire…

Tu n’as pas toujours porté des locs, qu’est ce qui t’a motivé à passer le cap ?

Lorsque j’ai commencé à travailler en entreprise, je me suis rendu compte que 100% des hommes noirs avaient exactement le même style capillaire. Ils portent leurs cheveux très courts et leurs contours taillés au laser ou encore la boule à zéro. Je faisais partie de la première catégorie.

J’ai toujours eu un instinct anti système et rebelle. J’aime me démarquer des autres et sortir des sentiers battus. Du coup, cela m’a vite incommodé, j’avais l’impression d’être dans un uniforme.

Durant la même période, j’ai assisté à l’avant première de Marley, un film qui retrace l’histoire du reggae et de Bob Marley. C’est un peu cliché mais c’est là que j’ai commencé mon aventure capillaire.

Comment s’est déroulé ton aventure capillaire ?

 J’ai fait les choses par étape. J’ai laissé mes cheveux poussés pendant un an et demi puis je suis passé aux locs. Le plus difficile a été de choisir la méthode de locksage avec laquelle j’allais démarrer. Il en existe quatre, le twist, le crêpage, le latching et le freeform. Une fois décidé, le choix du salon a suivi. Internet et les réseaux sociaux furent mes meilleurs amis. Les forums ont été d’une grande aide. Sans cela, il aurait été compliqué de faire des recherches et de compiler les informations sur le sujet.

« Les commentaires d’anciens et d’actuels clients m’ont aidé à me faire une idée sur les techniques et la qualité du travail de chaque coiffeur. »

Pendant toute cette période, j’ai du développer des facultés de patience que je n’avais pas. Si bien que c’est avec tristesse et irritation que je constate que la majorité des personnes qui portent des locs notamment à Sao Paulo utilisent de fausses locs, temporairement, comme un simple accessoire de mode, toutes communautés confondues.

 En général, les locs ne sont pas bien perçues, comment est-ce que ton entourage personnel et professionnel a réagit ?

 Du côté familial, pendant plusieurs semaines, ce fût le sujet de conversation, pire qu’une telenovela. De façon générale, les gens ont une idée assez limitée des porteurs de locs. Dans l’imaginaire collectif, les dreadlocks n’inspirent ni stabilité, ni responsabilité mais marginalisation. Ma famille était très préoccupée par l’impact que cela pourrait avoir sur ma construction personnelle et dans le développement de ma vie professionnelle.

« Dans l’imaginaire collectif, les dreadlocks n’inspirent ni stabilité, ni responsabilité mais marginalisation. »

Au final, côté professionnel, mes locs ont été perçues comme quelques choses de fun et différent mais sans impact négatif. J’ai préféré anticiper la surprise et les questions qui auraient pu se poser en faisant un teasing sur le sujet.  Au final, j’ai suscité l’intérêt et la curiosité de mes collaborateurs les plus proches.

Tu parles des préoccupations de tes proches. Mais qu’en est il des tiennes ?

 Jusqu’à ce moment, en tant qu’homme, je m’étais construit avec les cheveux courts. J’avais une routine capillaire simple et sans extra. J’ai du apprendre à me regarder différemment et à m’accepter avec ce nouveau style. J’ai du apprendre à être patient et à m’informer.

Bizarrement, sans m’en rendre compte, cela a aussi impacté mon style vestimentaire et les couleurs que je portais. J’ai aussi appris a regarder le monde différemment en me basant sur la perception que certain pouvait avoir à mon égard. Par exemple, je me suis rendu compte que j’étais davantage sollicité dans la rue comme potentiel fumeur ou que je plaisais à d’autres styles de femmes.

Aujourd’hui, avec les cheveux plus longs, j’apprends que je peux avoir une tête différente ou dégager une nouvelle énergie autour de moi en fonction de la façon dont je les porte.

Mais j’ai surtout du apprendre à me concentrer sur les énergies positives autour de moi qui ferait de cette nouvelle aventure un succès.  Ma compagne de l’époque fut ma plus grande fan et cela a beaucoup aidé.

 Comment les entretiens-tu au quotidien ?

 Au début, j’étais très attentif. J’utilisais des produits spécifiques avec une routine de soin stricte.

Aujourd’hui, je soigne mon alimentation, je m’hydrate beaucoup. Côté cheveux, je fais une manutention* autrement dit une reprise de locs tous les 2 mois et un shampoing 3 fois par mois.

*Une fois les locs démarrées, les cheveux poussent. Il faut donc régulièrement reprendre les racines et appliquer les même méthodes énoncées plus haut.

 On constate une véritable révolution en France, est-ce que c’est le même cas au Brésil ?

J’ai démarré mes locs en France mais c’est véritablement au Brésil qu’elles ont pris grâce à ma coiffeuse favorite.
Il y a une véritable tendance au retour du naturel par la communauté noire et plus spécifiquement par ma génération et celle qui est plus jeune. Les mouvements afro-américains sont très suivis au Brésil. Ils ont un grand impact sur la communauté.

La démocratisation des plateformes digitales permet la montée en force des influenceurs sur des thématiques comme la beauté et le capillaire. On voit des produits toujours plus respectueux émerger et les grandes marques l’ont bien compris. Elles commencent à investir dans le secteur. Cependant, les dreadlocks restent le style capillaire le moins mediatisé et consideré.

Merci Joao

 

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