François Oulac, journaliste et podcasteur du Tchip

François, journaliste et podcasteur

Depuis un petit moment, un nouveau média fait parler de lui, il s’agit du podcast. A l’heure où nous prenons l’habitude de faire plusieurs choses en même temps, il a su s’imposer doucement mais surement.  C’est d’ailleurs en écoutant un épisode du Tchip sur Arte Radio que j’ai entendu François parler de l’entretien de sa barbe en hiver. Quelques semaines plus tard, voici l’interview où il nous parle d’exister au sein d’un média « blanc », de son parcours capillaire, de racisme et des produits qu’ils utilisent.

Bonjour François, peux-tu te présenter ?

Je m’appelle François, j’ai 30 ans cette année et je suis journaliste. Je travaille pour un média du nom de Loopsider. Mon père est moitié Martiniquais, moitié Guadeloupéen et ma mère Martiniquaise.  J’ai vécu en Martinique dans ma petite enfance puis à 6 ans je suis arrivé à Paris où je vis encore.

J’anime avec deux amis, Kévi Donat et Mélanie Wanga, un podcast appelé Le Tchip. Toutes les deux semaines, nous discutons de la culture afro au sens large.

« Ca peut aller du dernier album de Kalash, à des thèmes plus larges comme l’afrofuturisme ou plus anecdotiques, comme le coup de pied d’Evra. »

Comment avez-vous eu l’idée de créer un podcast ?

« Cette idée est venue il y a deux ans d’une envie de créer mon propre projet où certains sujets peu abordés seraient traités. »

J’ai rencontré Kévi à cette période. Il a tout de suite été emballé. Peu de temps après, j’ai fait la connaissance de Mélanie avec qui j’ai eu un coup de cœur professionnel. Puis, les choses se sont faites naturellement.

« Nous apportons tous les trois une valeur ajoutée différente au podcast. »

Je suis fan de hip-hop, j’aime la culture des jeux vidéo et des mangas. Kévi est guide touristique. Il a créé les visites du Paris Noir. Il a une très bonne connaissance du stand-up et des humoristes noirs. Il apporte ses connaissances académiques, littéraires et historiques, et il est très bon pour raconter des histoires.

Mélanie connaît très bien les enjeux liés au féminisme. Elle anime notamment un autre podcast et une newsletter du nom de Quoi de meuf. Elle suit les gossips liés au Black Hollywood et c’est une grosse consommatrice de séries.

Dès le départ, nous savions que nous voulions être trois. Kevi et moi sommes des hommes, d’une part et Antillais d’autre part. La venue de Mélanie, Franco-Ivoirienne a apporté une dimension nécessaire au podcast : on s’intéresse à l’afroféminisme et on voulait pouvoir en parler, mais en tant qu’hommes on ne voulait pas s’approprier ces sujets.

Vous n’êtes pas le seul média à aborder ce type de sujet dorénavant. Penses-tu que cela engendra une prise de conscience des médias plus traditionnels et que ces sujets pourront être traités plus globalement ?

Oui et non. Cela se fera sous certaines conditions uniquement. Le format podcast commence tout juste à émerger. Je suis persuadé que ce sera énorme dans 2 ou 3 ans.

Il y a vraiment une prise de conscience de la part des médias plus traditionnels autour et c’est déjà pas mal. Après, la question à poser est de savoir s’ils vont prendre en compte le contenu spécifique au podcast afro.

J’ai le sentiment que les médias afro reçoivent si peu de soutien hors de la communauté, qu’ils se sont habitués à exister en-dehors des médias traditionnels. Ils ne cherchent pas à devenir « mainstream ». On est conscients qu’avec le Tchip, on n’a rien créé de nouveau. En revanche, on a fait le choix d’exister au sein d’un média « blanc » et d’y créer un espace d’expression fait par des Noirs, pour que le public arrête de considérer les médias noirs comme une « niche communautaire ». Je pense que ça, c’est assez nouveau. Arte Radio nous laisse une liberté totale et comprend notre projet, donc on se sent un peu comme des privilégiés.

« C’est important de parler à tout le monde pour s’insérer dans le système actuel et ne pas exister en parallèle uniquement. »

Parlons maintenant cheveux et barbe, quelle coiffure portes-tu en ce moment et comment les décrirais-tu ?

Ma coupe de cheveu actuelle est un dégradé que je porte depuis 2 ou 3 ans.  C’est aussi à cette période que j’ai laissé pousser ma barbe.

J’ai un cheveu crépu mais relativement souple car lorsqu’ils sont très courts, on dirait qu’ils sont plutôt ondulés.

As-tu toujours porté tes cheveux de la sorte ?

Je n’ai pas beaucoup expérimenté avec mes cheveux. J’ai porté l’afro deux fois, une fois au lycée et une autre à la fac.

« J’avais envie de changer de tête et c’était la seule coupe que je pouvais me permettre. »

Mes parents et plus précisément ma mère possèdent une vision traditionnelle du cheveu antillais.

« Il n’était pas possible de faire des nattes, des vanilles ou même des locs, pour eux c’est synonyme de délinquant et de voyou. »

Par contre, un vide juridique subsistait concernant l’afro. J’en ai donc profité. Il ne me demandait pas énormément d’entretien si ce n’est le démêlage sur cheveux mouillés et d’appliquer de l’huile de temps en temps.

« A la même période, j’ai porté des tresses collées. Au désespoir de ma mère… »

Est-ce que tu te souviens d’une anecdote par rapport à tes cheveux pendant cette période ?

J’en ai beaucoup. Au lycée quand j’avais l’afro, un mec de ma classe me touchait parfois les cheveux en chantonnant « Bamboula ».

En école de journalisme, je me suis fait applaudir par toute la classe, le jour ou je suis venu pour la première fois sans tresses, avec mes cheveux longs et détachés. Il y a plusieurs manières d’interpréter ces applaudissements. Ils ne sont pas forcément négatifs mais j’ai eu l’impression d’être une bête de foire.

Sinon, un jour quand j’étais ado, un coiffeur réalisait une coupe très courte sur mon cheveu. Une mère et son enfant sont entrés. La mère a demandé au coiffeur d’avoir exactement la même coiffure que moi. Etonné, le coiffeur a répondu que ce sont mes cheveux naturels. Lorsque j’ai raconté cette anecdote à ma mère, elle en était très fière.

« Son fils avait de « beaux » cheveux… »

Tu as 3 anecdotes, ce qui est beaucoup pour ces périodes qui sont importantes dans la construction de soi, comment réagissais-tu à l’époque ?

Quand j’étais confronté au racisme, j’étais agacé et énervé, je me défendais. Il m’est arrivé d’en venir aux mains avec des camarades de classe. Si certains trucs qui me sont arrivés ados m’arrivaient à nouveau, je réagirais plus violemment*. Je suis plus sensible au racisme qu’avant.

*/!\ Les Bouclées ne cautionnent pas la violence !

Est-ce que ça t’a influencé dans ta manière de voir le cheveu crépu, le tien déjà puis celui des autres notamment du sexe opposé ?

J’ai vécu du racisme à l’adolescence comme n’importe qui, mais ça ne m’a pas créé de complexe par rapport à ma peau et mes cheveux, j’ai toujours été fier d’être noir. Le vrai danger ne venait pas des autres mais de ma propre culture. En tant qu’Antillais, j’avais intégré certaines perceptions coloristes – par exemple, les femmes plus claires de peau sont plus belles, etc.

« Ce sont des croyances que j’ai déconstruits en grandissant. »

Revenons à toi et tes habitudes capillaires, est-ce que tu as un bon coiffeur à recommander ?

J’ai pris du temps avant de trouver un bon coiffeur notamment un qui prenne son temps et qui fasse attention. J’ai fréquenté des salons où je sortais avec de nombreuses coupures. Ca peut arriver mais il ne faut pas exagérer. D’ailleurs,  j’ai remarqué qu’on a tendance à ne pas se plaindre et à supporter en silence.

Maintenant, je vais chez Diamant Noir tout comme Kévi et mon père.  C’est un salon vers Strasbourg Saint Denis que je recommande.

Quels sont les produits dont tu ne pourrais pas te passer ?

J’utilise un baume à la menthe poivrée de la marque Planète Rasoir Paris 1966 pour ma barbe. Pour mes cheveux, j’achète un baume à l’huile de cactus chez Diamant noir.

C’est à peu près tout si ce n’est qu’il m’arrive de faire des masques entre deux shampoings Klorane.

On constate de plus en plus de femmes reviennent au naturel, un avis sur ce mouvement ?

Je trouve ça très cool et nécessaire, tout le monde devrait avoir la liberté de porter ses cheveux comme on l’entend. J’espère simplement qu’on ne va pas tomber dans l’excès inverse et pointer du doigt les femmes qui choisissent de porter des perruques ou des tissages par exemple. Chacun fait ce qu’il veut !


Retrouvez les épisodes du tchip sur Arte Radio, l’application podcast de votre iphone si vous en avez un ou sur soundcloud.

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